Corsica Catolica

Le piège de la laïcité

20 Décembre 2020, 22:01pm

   Via Stella nous a récemment permis d'assister à un débat sur la laïcité en Corse. La question était de savoir comment elle était appliquée en Corse. Il fallait d'abord la définr. Elle le fut. C'est "la séparation de l'Eglise et de l'Etat". Ainsi la lutte séculaire entre le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel allait prendre fin. Chacun de son côté, et libre. Quoi de mieuxen effet ? N'était-ce pas la meilleure façon d'éviter les heurts? La solution était élégante et logique. Nous allions enfin assister à la paix entre César et Dieu.                                                                                                                  Cependant il fallut bientôt constater que la réalité démentait la logique. Il y eut des grincements dans le système, et des problèmes, quelque fois capitaux. Pourquoi ? La première raison est que cette séparation n'existe pas. Sinon, pourquoi pourquoi y a-t-il un Ministère des cultes ? Pourquoi l'Etat intervient-il dans la nomination des évêques ? Pourquoi contrôle-il étroitement les établissements "libres" sous contrat ? Cette séparation est donc un mensonge. Celà crève les yeux- et c'est pourquoi on ne la voit pas. Un bel exemple de cette cécité nous est fourni par BHL, le grand philosophe de la République. Il vante la neutralité de l'Ecole, qu'il appelle, d'un mot savant " l'équidistance". L'Etat serait à égale distance de toutes les religions, et distinct d'elles. Elles pourraient donc s'épanouir librement,non seulement dans le coeur des croyants, mais même se manifester dans l'espace public. Par exemple, pour l'Eglise catholique, par des processions. Oui, bien sûr, mais ...car il y a un "mais". Il ne faudrait pas que ces manifestations portent tort aux principes inculqués par l'Ecole, ou qu'elles troublent l'ordre public, dont le Préfet est juge. Moyennant quoi les Religions sont libres. En somme c'est la liberté surveillée. BHL s'extasie devant sa théorie, "coeur battant de la Démocratie". Le pire, c'est qu'il paraît sincère.Hélas! BHL n'est pas Platon!                                                                                                           Le problème demeure. Cette séparation est-elle possible? Peut-on "éduquer" un enfant sans lui enseigner ce qu'il faut faire, ce qu'il ne faut pas faire, ce qui est bien, ce qui est mal ? Bref, sans une Religion, ou une Philosophie qui en tienne lieu ? Il y a longtemps que Michelet, qui est honnête, a répondu à la question. "la République n'a pas de Religion, car elle est elle-même une Religion". C'est clair et net.                                                                                                                Mais quelle Religion ? La Religion de l'Homme, évidemment, celle qui est issue des Lumières, qui célèbre l'émancipation de l'individu, le Bonheur et le Progrès. On pouvait s'y tromper dans les premiers temps: la morale de l'Instituteur ne différait guère de celle du Curé, et la coexistence était possible: on n'abolit pas en un jour une culture millénaire. Mais, peu à peu, les principes ont développé leurs conséquences. Ecoutons Peillon, ancien Ministre de l'Education Nationale. "La Révolution française est un commencement absolu, l'incarnation, l'engendrement d'un homme nouveau. La Révolution est un événement religieux qui implique l'oubli total de ce qui la précède. L'Ecole a un rôle fondamental, celui de dépouiller l'enfant de toutes ses attaches prérépublicaines, pour l'élever jusqu'à devenir citoyen. C'est bien une nouvelle naissance, une transsubstantiation qui s'opère par l'Ecole; cette nouvelle Eglise, avec son nouveau Clergé, sa nouvelle Liturgie, et ses nouvelles Tables de la Loi. Il fallait une Religion à la République: c'est la Laïcité."                                                                                                                                                                                                            On ne saurait mieux dire: la République doit arracher l'enfant à sa famille, à sa culture, à sa patrie. Il faut faire table rase du passé pour construire le monde de demain, oû chaque individu sera un Dieu. Voilà qui s'oppose radicalement non seulement au nationalisme classique, mais à des penseurs tel que "la Vierge rouge"-Simone Weil-:"un peuple sans passé est un peuple sans avenir" ou à Edgard Morin- qu'on ne saurait soupçonner d'être ringard-" Le futur se fait avec le passé". Il n'empêche que "Etat moderne" poursuit son objectif avec un implacable fanatisme.Et par les moyens que nous savons,autrement efficaces que ceux des anciens totalitarismes, qui ne connaissaient que les camps de concentration, les goulags et les hôpitaux psychiatriques. L'Etat moderne a l'art de faire désirer à ses sujets leur assujettissement. Les délices de la servitude. Huxley.                                                                                                                        Les Corses, qui furent fiers, se laisseront-ils faire? Quant à nous, nous ne prendrons pas la peine de faire l'historique de la lutte du pouvoir temporel contre le pouvoir spirituel, et de ses vicissitudes, partout en Europe, et spécialement en France. Si la Corse était libre (irréel du présent,en latin subjonctif présent "corsica si libera esset"). Nous nous contenterons de définir le mot "laïque", et d'en tirer les conséquences. Le mot "laïque" vient du grec "laos" -le peuple-. Or le peuple corse est chrétien' comme tous les peuples européens, avec des traits distinctifs. La Corse est à la fois franciscaine, mariale et vaticane. L'Ecole émane du peuple et servir le peuple.( L'Ecole de Jules Ferry a voulu, frauduleusement, se faire passer pour l' Ecole du peuple. Frauduleusement , car Jules Ferry, grand bourgeois passablement hautain, n'a rien de commun avecles ouvriers et les paysans). L'Ecole de notre peuple doit être, en toute vérité, une Ecole chrétienne. Elle doit proposer -et non imposer-notre Religion. Les autres Religions, ou absences de Religion, seront tolérées, par mesure prudentielle, en considération du Bien commun, pour assurer la paix sociale. Elles ne seront pas pourtant, chez nous, placées sur le même plan que les autres. Et nous verrions fleurir une civilisation et des moeurs à saveur divine. La Corse n'a jamais compris la séparation de l'Eglise et de l'Etat. Elle chante le Dio Vi Salvi Regina dans toutes les cérémonies, tant civiles que religieuses, le plus naturellement du monde. Son Histoire, en effet, s'est toujours écrite dans les couvents. Distinction, oui, séparation, non! Ainsi l'Etat remplirait son rôle: aider les hommes à passer , de ce monde "sublunaire" au monde éternel, du pays des ombres au pays de la lumière. Est-ce un rêve? une utopie? Non, car le Christ n'est pas un idéal, une abstraction planant dans l'éther. L'Homme nouveau, c'est lui. Il s'est incarné en Palestine, est mort et ressuscité. Il est le garant de la résurrection des hommes et des sociétéés. Christus vincit -n'en déplaise à Peillon-!             

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